Système de santé russe : beaucoup d’avantages, et quelques inconvénients

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La crise, exagérée ou pas du Coronavirus a mis sous la loupe le système de santé de chaque pays, responsable soit de plusieurs dizaines de milliers de morts comme en France par exemple, soit de “seulement” quelques milliers comme ici en Russie. Je ne vais pas décrire une fois de plus les mesures qui ont permis de limiter ce nombre de décès, mais plutôt comment fonctionne ce système à Moscou en particulier, en temps normal, hors situation de crise.

Tout d’abord quelques généralités : les soins sont gratuits en Russie pour les citoyens russes et les résidents permanents. En situation d’urgence (accident de la route, crise cardiaque, etc.), tout le monde (touristes, étrangers, clandestins etc,) toutefois sera soigné “au minimum” et prié ensuite soit de se faire transférer dans une structure payante, soit de sortir. L’accès à la médecine habituelle (consultations, opérations, analyses etc.) n’est donc gratuit que pour les Russes et résidents permanents.

À la base du système de santé, la “polyclinique”. Il y en a au moins une par quartier à Moscou, souvent plusieurs. Dans les plus petites on trouvera les médecins généralistes et quelques spécialistes, dans les autres il y aura toute la gamme de spécialistes, d’analyses, de services de tomographie, scanners, etc. Chaque quartier a également une ou plusieurs polycliniques “pour enfants” (jusqu’à 18 ans).

Chaque citoyen russe a accès aux polycliniques de “son” quartier. Reste du système soviétique, chaque citoyen (et résident) a en effet une adresse d’enregistrement officielle, ou il est censé résider. Dans la pratique peu de gens habitent où ils sont enregistrés mais c’est un autre sujet ! Et donc de cette adresse d’enregistrement dépend l’accès aux polycliniques.

Chaque citoyen russe a un livret médical, espèce de gros livre où sont recensés toutes les analyses, consultations etc. Il est conservé dans la polyclinique habituelle de la personne. Mais à Moscou ce livret est depuis quelques années électronique et chacun y a un accès total en ligne, il suffit d’ouvrir son compte.

Pour prendre rendez-vous chez un spécialiste, il faut en général passer par un généraliste. Les ORL (LOR en russe !), ophtalmos, dentistes et chirurgiens sont toujours en accès direct. Selon votre “catégorie sociale” vous aurez en plus l’accès direct aux urologues (personnes de plus de 60 ans), gynécologues (femmes), allergologues (si vous êtes à risque” d’allergies), endocrinologues (si vous êtes malade du diabète), etc.

Tous les rendez-vous se font en ligne (mais il est toujours possible de le faire par téléphone ou en se déplaçant à la polyclinique). À Moscou la mairie a développé une application qui permet entre autres de s’inscrire dans “sa” polyclinique en quelques minutes. Quand un généraliste vous fait une ordonnance pour aller consulter un spécialiste, un accès vous est ouvert sur votre compte en ligne et c’est à vous de prendre le rendez-vous en choisissant le spécialiste, la polyclinique (parmi celles de de votre quartier), et l’heure.

Les résultats des analyses prescrites seront dans votre livret médical (accessible en ligne donc) sous 24 à 72 heures, ainsi que les photos d’échographies, les résultats des scanners, etc. Ceci permet d’ailleurs une “auto-médication” fréquente, par exemple on consulte les résultats de ses analyses de sang et on décide d’aller voir ou non le médecin, de continuer ou d’arrêter un médicament etc.

Nous sommes grands partisans de cette auto-médication en Russie, peut-être car il est vrai qu’il y a quelques années le niveau des médecins ici était bien loin de celui des médecins en Europe ou aux États-Unis! Une autre raison est que tous les médicaments ici sont en vente libre ! Il y a bien en théorie des médicaments “uniquement sur ordonnance” mais ceci reste très théorique et en pratique vous achetez ce que vous voulez dans les pharmacies.

Les délais pour consulter un médecin sont très rapides, le jour même ou dans le jour suivant pour un généraliste, et disons un grand maximum d’une semaine pour un spécialiste. Pareil pour les examens techniques (scanner, IRM, etc), en général une semaine de délai, sauf cas d’urgence ou c’est immédiat.

Cette médecine “d’entretien” se fait donc à la polyclinique. Lorsqu’on détecte chez vous un problème nécessitant une opération de chirurgie, on vous envoie alors à l’hôpital. Même principe que pour la polyclinique, soins gratuits pour les Russes. Les hôpitaux à Moscou n’ont rien à envier à ceux en Europe, que ce soit pour la qualité des soins, du matériel ou des chambres. Tout y est gratuit même si l’usage est de donner quelques cadeaux au personnel soignant en partant. Ce n’est en aucun cas une obligation, et les “obligations” de payer pour être soigné ne sont plus que de mauvais souvenirs.

Chaque citoyen russe a droit à des examens complets selon son âge. À partir de 60 ans,  c’est tous les ans un bilan complet avec radio des poumons, contrôle de l’hypertension, diabète, etc. Les vaccins sont toujours facultatifs même si les services médicaux font des campagnes importantes par exemple pour le vaccin contre la grippe chaque année. Si comme moi vous le refusez, à chaque visite à la polyclinique on vous le reproposera et vous signerez votre refus sur un formulaire. Les enfants ont par contre les mêmes campagnes de vaccination qu’en Europe, qui sont obligatoires.

Les médicaments sont en principe tous payants. Mais il existe des exceptions pour certains médicaments et certaines catégories sociales.

Par exemple le gouvernement a lancé il y a quelques années un suivi permanent des malades du diabète pour les personnes à partir de 60 ans.

Tous les médicaments leur sont fournis gratuitement, ainsi même que les appareils de mesure et les “dosettes” (je ne sais pas le nom ?!) pour mesurer son taux de sucre soi-même. Les catégories sociales les plus défavorisées ont toutes leurs médicaments gratuits, à retirer dans chaque polyclinique. Un service de livraison à domicile gratuit existe aussi.

Pour les autres, donc, tous les médicaments sont payants et ne nécessitent pas d’ordonnance. Le prix des médicaments est entièrement libre, on peut donc comparer sur internet et choisir où les acheter.

Beaucoup de médicaments sont importés mais la plupart existent, faits en Russie, à des prix beaucoup moins importants.

En cas d’urgence, on peut soit appeler le médecin mobile de “sa”polyclinique, qui vient dans la journée, soit appeler le “103”, qui intervient pour les problèmes plus sérieux (infarctus – “insulte” en russe !, personne blessée, AVC etc.). À Moscou le 103 intervient dans les 5 à 15 minutes, des patrouilles sont en attente dans chaque quartier en permanence.

À côté de cette médecine “gratuite” il y a une foule de services privés, certains avec cliniques complètes pratiquant des opérations lourdes. Y vont les étrangers d’une part (expatriés par exemple) et les Russes préférant payer pour avoir, du moins le pensent-ils, un meilleur service. Certes, là-bas on offre le café dans la salle d’attente, mais… Voyons un peu de plus près ce que sont ces cliniques privées.

D’abord, y travaillent très souvent les mêmes médecins que dans les polycliniques, qui font des heures pour améliorer leur salaire. Leur travail consiste dans ces cliniques privées à faire faire le maximum possible d’analyses, facturées au prix fort, par les clients. Une consultation de généraliste coûte en moyenne 2 000 roubles, 4 000 pour un spécialiste. À ajouter donc les analyses prescrites dont les prix vont de 3 000 à 50 000 roubles. (Un euro = 70 roubles). Chaque consultation avec analyse implique une consultation suivante, etc. Au final, le résultat sera le même qu’à la polyclinique, facture en plus.

J’avoue qu’il m’est arrivé de me rendre dans une clinique privée afin de confirmer un diagnostic de tumeur. La polyclinique, après plusieurs analyses et un scanner, m’avait dit qu’il était inutile d’opérer, qu’on pouvait “attendre en surveillant”. Vu l’importance de la chose j’ai voulu avoir un second avis. Je suis arrivé en consultation à la clinique privée avec les analyses déjà faites, scanner, échographies etc., ce qui ne leur a pas plu bien entendu. Le spécialiste a déclaré tout de go qu’il fallait opérer sans tarder et m’a conseillé de le faire dans son service. Coût environ 300 000 roubles. Et j’ai appris que “son” service était en fait situé dans un hôpital public où cette clinique privée loue des chambres et un bloc opératoire. En d’autres termes, si je passe par la polyclinique j’aurai l’opération gratuite au même endroit. En fin de compte je suis allé voir, par relation, un autre spécialiste qui m’a finalement confirmé le diagnostic de la polyclinique : pas d’opération nécessaire. C’était il y a 8 ans et la tumeur s’est résorbée presque définitivement d’elle-même.

Disons que les cliniques privées restent utiles pour une chose : les soins que ne font pas les services publics : esthétiques par exemple, mais aussi les traitements à base de cellules souches, et pour ça oui, elles sont intéressantes. Pour le reste…

C’est à peu près la même chose pour les soins dentaires. Les polycliniques proposent des soins soit gratuits très corrects, même si en payant (une faible somme en général) vous pouvez avoir un travail avec des produits de meilleure qualité par exemple pour faire une couronne. Et les cliniques privées vont vous facturer une fortune pour le même résultat… Mais avec thé ou café offert, et une chirurgien-dentiste plus attrayante peut-être).

Dans le reste de la Russie, le principe de fonctionnement est le même mais l’infrastructure est bien loin d’égaler celle de Moscou. Cliniques délabrées et personnel sous-payé font que la qualité des soins est loin d’égaler celle de la capitale, bien qu’il y ait eu d’énormes progrès de rénovation et de renouvellement de matériel ces 10 dernières années. Des villes comme Novosibirsk, Ufa, Nizhny Novgorod, Samara par exemple ont un très bon niveau de soins. Dans les petites villes et villages c’est une autre situation, c’est d’ailleurs le fait dans tous les pays.

L’étendue de la Russie accroît considérablement les problèmes.

Alors quel est l’état général de la médecine en Russie ? Eh bien on peut dire qu’à Moscou, la médecine est en bien meilleur état que dans bien des pays européens. Dans les autres grandes villes, au même niveau. Mais le problème est bien entendu dans les petites villes et villages où…

Comme dit un ami, mieux vaut soit ne pas être malade, soit être très gravement malade. Dans ce dernier cas en effet les services d’urgence sont performants. Mais pour une maladie non vitale immédiatement, il y a problème et beaucoup de personnes préfèrent ne pas aller voir le médecin. Auto-médication, encore…

Une précision maintenant sur la situation actuelle due au Coronavirus. Une campagne massive de dépistage dont je parlais dans un de mes précédents articles est en cours dans l’ensemble du pays. Entre 7 000 et 10 000 personnes infectées sont “découvertes” chaque jour, chiffre important mais il semble qu’enfin les responsables médicaux se soient rendu compte que le taux de mortalité est en fait extrêmement bas, puisqu’il y a depuis le début de l’épidémie un peu moins de 5 000 décès dans l’ensemble de la Russie. Inutile donc de comparer avec les chiffres astronomiques européens ou américains. En d’autres termes, les gens sont malades mais guérissent sans problème. 5 000 décès sur 415 000 personnes détectées infectées c’est à peine plus de 1 %. Environ 99 % des personnes donc guérissent sans problème. Suite à ces analyses, le déconfinement est en cours dans tout le pays.

À Moscou aujourd’hui tous les magasins et sociétés ainsi que les parcs ont rouvert, seuls les lieux de restauration restent fermés jusqu’au 14 juin. La mairie a diffusé un “graphique” prétendant autoriser les Moscovites à sortir 3 fois par semaine en fonction de leur adresse (!). C’est totalement ignoré, les gens sortent comme ils le souhaitent. La mairie a également imposé le port du masque dans la rue, c’est également généralement ignoré. Un ras-le-bol contre le maire de Moscou grandit et on s’attend à sa révocation d’ici quelques semaines. Mais c’est une autre histoire.

Boris Guenadevitch Karpov

17 Commentaires

    • SYSTÈME DE SOINS ENTIÈREMENT PRIS EN CHARGE PAR LE GOUVERNEMENT SAUF LES MÉDICAMENTS , SUR INTERNET OU PHARMACIE PAS DE PÉNURIE USINES DE FABRICATION EN RUSSIE TOUTES MOLÉCULES HÔPITAUX CLINIQUES EXTRAORDINAIRES DANS LES GRANDES VILLES , ORDINAIRES COMME EN FRANCE POUR LA PROVINCE MÉDICAMENTS PRIS EN CHARGE POUR LES MALADIES GRAVES

    • Pour les salaries: Cotisations pour le systeme medical = 8% du salaire. Cette cotisation est versee directement par l’employeur, et en Russie on parle toujours de salaire NET entre salarie et employeur. Ce dernier paye toutes les charges sur le salaire y compris l’impot sur le revenu du salarie.

      Pour les travailleurs independants: En 2020, cotisation fixe de 8426 rub (environ 105 euros) par an. Payable quand on veut avant le 31 decembre.

      Depuis 2 ans les cotisations pour le systeme medical (et les retraites egalement) sont collectees par le service des impots, qui ensuite reverse aux organismes concernes.

  1. Les prélèvements obligatoires doivent avoisiner 15% du PIB, l’IRPP 15% (30% pour les non-résidents) et l’IS de l’ordre de 15% en moyenne, avec des taux plus divers. La dette représente 15% du PIB (en France c’est 98% en 2019 et dans les 130% en 2021). Avec ça la Russie a aussi la meilleure défense militaire au monde (et vraisemblablement encore une bonne défense civile), un niveau d’éducation supérieur à la France, un niveau de vie comparable à l’Europe occidentale, un niveau de satisfaction, cohésion sociale et développement spirituel très supérieur à tout autre pays européen ou américain. Pourtant elle gère un territoire immense et une centaine de peuples. Mais j’attends moi aussi avec intérêt la réponse de Boris Karpov, mieux informé que moi.

  2. La Russie est le plus grand paradis fiscal (et pas seulement fiscal) au monde, avec pourtant un Etat bien géré qui assume toutes les fonctions régaliennes (en France elles ont été abandonnées), et même plus (quelques fonctions non régaliennes).

  3. « Eh bien on peut dire qu’à Moscou, la médecine est en bien meilleur état que dans bien des pays européens ». Quitte à comparer les capitales européennes, pouvez-vous me dire laquelle baisse la garde médicale face à Moscou ? Je serais réellement enchanté de l’apprendre…

    Gestion Covid ? Vous verrez, le grand prix d’excellence sera accordé à la Slovaquie de la libérale (ayayaye) Caputova. Je parle bien ici de votre ancienne colonie tchécoslovaque…

  4. Le même problème dans tous les pays : le rural isolé est apparemment moins bien servi. Mais je remarque que la Russie est performante sur le plan régalien, ce que n’est pas notre France de gauchistes-mondialistes vendus aux labos, ni d’ailleurs l’Allemagne où le poids des mutuelles complémentaires privées (hôpital public: beueurk ) est devenu exorbitant pour des soins “de classe”, c’est-à-dire modernes. Article très intéressant.

  5. La France et sa dégringolade du meilleur service de santé au monde devrait
    prendre exemple sur la Russie !
    Tous les présidents français ou presque et surtout macron, ont contribué à la ruine du pays .

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